Claude AUBER arriva au Canada le 25 juin 1647 au port de Québec. Il était a bord de l'Amiral (300 tonnes) ou du St-Sauveur (150 tonnes). Ces vaisseaux faisaient partie d'une flotte commandée par le capitaine Legardeur Repentigny. Les traversées, à cette époque, étaient d'une durée d'environ deux mois. Il y avait a bord des deux vaisseaux, 200 passagers dont 142 ont été identifiés. De ce nombre, on identifie Claude AUBER, 32 ans, sa femme Jacqueline LUCAS, 30 ans et leurs fils Felix, 3 ans. Sur la même arrivée, on identifie le notaire Guillaume AUDOUART qui pratiqua jusqu'en 1663 et retourna en France, et le notaire Lambert CLOSSE qui pratiqua de 1651 à 1657. Il était major dans l'armée et un militaire émérite qui mourut en 1662 durant une attaque par les Iroquois. Il y avait aussi Jacques ARCHAMBAULT, sa femme Françoise TOURAULT et ses sept enfants. Il est l'ancêtre des ARCHAMBAULT d'Amérique.
Claude AUBER est natif de Caen, en Normandie, fils de Jacques AUBER et de Marie LE BOUCHER. Jacqueline LUCAS est native de Ste-Croix de Troarn en banlieue de Caen où ils se sont mariés en 1640. De la folle aventure en Amérique, aucun contrat, aucun engagement ne peut nous éclairer sur les conditions dans lesquelles il serait venu en Amérique, sauf qu'il serait venu à ses frais et qu'il est issu d'une ancienne famille noble de Caen et Honfleur dont plusieurs membres étaient des hommes de mer et que quelques uns de ses contemporains avaient fait des voyages au Canada avant lui.
A son arrivée au Canada, la population blanche était d'environ 600. La famille AUBER s'installa à Québec dès son arrivée où Claude fut cité pour la première fois le 8 septembre 1647 comme témoin à obligat. Peu après, il commenca à exercer comme notaire seigneurial dans la seigneurie de Beaupré. Son premier acte date du 28 octobre 1650. Il fut le premier notaire seigneurial de la Côte de Beaupré.
Olivier LE TARDIF lui concéda une terre à Chateau-Richer le 22 mai 1650. La terre numéro 69 était le 6 arpents de front sur le fleuve avec une profondeur de 126 arpents pour une superficie de 756 arpents, située entre les terres de Jean GALLERAN BOUCHER et de Jean GUYON DE BUISSON.
Même s'il pratiquait à Château-Richer et qu'on lui avait concédé une terre à cet endroit, il n'habita Château-Richer que vers 1660 où en plus de sa profession, il commenca à exploiter sa terre. Il avait 46 ans. Il était parmi les premiers habitants de la Côte de Beaupré à qui Olivier LE TARDIF concéda des terres en 1650 et 1651 et où seront formés les futures paroisses de Notre-Dame de la Visitation à Château-Richer et Notre-Dame du Petit Cap à Ste-Anne de Beaupré.
Il est intéressant de voir la liste des noms de ces pionniers à qui on concéda des terres: Jean JOLLIET, Macé GRAVEL, François BELLANGER, Simon et Jean GUYON, Claude AUBER, Marin BOUCHER, Toussaint TOUPIN, Claude BOUCHARD, Etienne LESSARD, Robert GIGUERE, Julien MERCIER, Louis GAGNIER, Pierre PICARD et Julien FORTIN.
De 1650 à 1663, Claude AUBER fut greffier et notaire seigneurial c'est-à-dire qu'il ne pouvait pratiquer que pour les seigneurs de la côte de Beaupré. Mais le 23 janvier 1664, le Conseil Souverain le nomma notaire royal pour la Nouvelle France, poste qu'il occupa jusqu'en 1693. Aucun notaire n'a pratiqué aussi longtemps au 17e siècle. Durant cette période, sa profession l'amena à s'impliquer dans des transactions et des contrats concernant quelques unes des grandes familles canadiennes du début de la colonie. Nous citons: Pierre, Guillaume et Marin BOUCHER, Claude BOUCHARD, Toussaint GIROUX, Monseigneur de LAVAL, Monseigneur de TRACY, Etienne et Robert DROUIN, Bertrand CHENAY de la GARENNE, Charles AUBERT de la CHENAYE, Etienne RACINE et sa famille, les Ursulines, Guillaume THIBAULT, Zacharie CLOUTIER, la famille GARIEPY, Macé GRAVEL, Zacharie MAHEUST, Olivier LE TARDIF, Mathurin GAGNON, la famille LANGLOIS et Charles LE GARDEUR DE TILLY.
Claude a fait construire une maison sur la terre qui lui avait été concédée et tout en pratiquant ses nombreuses fonctions, il déclare, au recensement de 1667, 30 arpents défrichés et mis en valeur et 12 bestiaux. A cette époque cette exploitation agricole était assez considérable. Contrairement à la plupart de nos pionniers, il ne déclare pas de fusil. Par contre, il déclare un domestique du nom de Jean BOUTEILLIER dit Têtu, natif de Ré, Aunis, 13 ans. Celui-ci maria Marie MORIN, à Montréal, le 23 juin 1695.
Claude AUBER était un homme peu loquace, imbu de dévouement pour son entourage et de qui on cherchait les conseils. Il était impliqué dans la vie paroissiale de sa communauté qui voit sa population croître rapidement. Elle passa d'environ 600 personnes en 1647 à 2500 en 1663. On le cite présent à plusieurs baptêmes, mariages et sépultures de ses voisins et amis, accompagné de Jacqueline, sa femme et parfois de ses enfants. Lorsque la première église de Château-Richer fut construite, entre 1658 et 1661, on demanda a Claude de s'occuper de la conduite de l'édification de la bâtisse et en considération de ses services bénévoles, la nouvelle fabrique lui concéda, le premier mars 1662, un emplacement tout près de l'église.
Cet emplacement joint, d'un côté, au nord-est, l'emplacement de l'église et de l'autre coté au sud-ouest, la terre d'Olivier LE TARDIF. Il y a, à un bout, le grand chemin que l'on projette d'établir le long du fleuve (aujourd'hui la route 138). L'acquéreur n'était tenu à aucune charge. Cependant, on considération des besoins de la nouvelle fabrique, Claude s'engagea à lui payer la rente habituelle. Il est probable qu'il n'ait jamais occupé cet emplacement puisqu'il avait sa maison à très peu de distance de là. Il appert qu'il a retourné cette terre à la fabrique.
Il fut nommé juge-prévôt pour la seigneurie de Beaupré par Monseigneur de Laval le 19 octobre 1671. Il démissionna de ce poste en 1676 à l'âge de 62 ans mais pratiqua toujours le notariat. Il avait déjà vendu sa terre à son fils Félix le 29 février 1675.
En 1681, à l'âge de 67 ans, il fut même appelé comme juge suppléant au Conseil Souverain. Il ne siégea que quelques fois pour remplacer M. LEGARDEUR DE TILLY, son grand ami depuis son arrivée au Canada.
Charles LEGARDEUR, sieur de TILLY, est arrivé au Canada en 1636 à l'âge de 20 ans. Il fut gouverneur de Trois-Rivières de 1648 à 1650. Membre du Conseil Souverain en 1663, il fut nommé à vie en 1675. Il était, tout comme Claude, de Caen en Normandie. Ils étaient du même âge et moururent à un an d'intervalle. Après la mort des doyens, les deux familles continuèrent l'amitié qui les unissait.
Parmi les amis de Claude fut M. de MEZY, gouverneur de la Nouvelle-France. Il demanda à Claude de rédiger son testament, le 4 avril 1665, en présence d'amis, alors qu'il était malade de corps mais sain d'esprit. Il demanda d'être inhumé dans le cimetière des pauvres à Québec et légua des sommes importantes à des institutions religieuses et à des oeuvres de charité. Il légua des sommes importantes à plusieurs personnes de son entourage dont M. LEGARDEUR de TILLY, un ami, à Claude AUBER son notaire et ami ainsi qu'à Félix AUBER, fils de Claude, qui avait travaillé pour le gouvernement avant qu'on lui concède un terre en 1661.
Après avoir vendu sa terre à son fils et avoir démissionné de son poste de juge-prévôt, il demeura à Chateau-Richer mais pratiquait sa profession et à Château-Richer et à Québec.
Le 24 août 1680, à l'âge de 63 ans, et après 40 ans de mariage, Jacqueline LUCAS, la femme de Claude, mourut à l'Hôtel-Dieu de Québec. Elle fut inhumée à la Cathédrale basilique.
Quelle belle vie d'amour et de dévouement. En 1647, elle abandonna, pour ne plus y revenir, la vie heureuse et d'aisance parmi les parents et amis de Troarn en France pour l'inconnu et la dangereuse traversée de l'Atlantique, vers un vaste pays à coloniser, avec son mari et son jeune fils encore bébé.
Elle fut une épouse et une mère dévouée. Elle éleva ses enfants dignement, s'occupa de la terre lors des nombreux voyages de son mari à Québec et elle était impliquée dans les activités de sa paroisse et de son village. Durant ses derniers jours à l'hôpital, ses enfants qui habitaient tous la région lui apportèrent, par leur présence, consolation et confort. Elle laissa 40 petits enfants.
Après le décès de sa femme, Claude habitait toujours Château-Richer, probablement chez son fils lorsqu'il fut nommé juge suppléant au Conseil Souverain en 1681. Vu ses voyages fréquents à Québec, dans l'exercice de ses fonctions et vu sa nouvelle nomination, il décida d'y habiter, se rapprochant ainsi de ses trois filles qui habitaient déjà la ville. Son autre fille habitait l'Ile d'Orléans.
Après quelques années de vie active et sereine, le malheur frappa Claude lorsqu'en 1690, à l'âge de 47 ans, son fils unique Félix fut frappé par la mort, laissant 5 enfants en bas âge et sa femme Françoise THIBAULT enceinte. Le plus vieux de ses enfants n'avait que 12 ans. A peine consolé de cette douloureuse perte, à l'automne 1693, sa fille Elisabeth, chez qui il habitait à Québec, se noya avec six de ses enfants lors du naufrage du Corossol en route vers Paris. Ce fut un coup fatal pour notre ancêtre qui fit son dernier acte de notaire le 22 septembre 1693 et s'éteignit le 20 mars 1694. Il fut inhumé dans la cathédrale basilique de Québec où déjà sa femme était inhumée. Ses filles Anne et Geneviève furent inhumées au même endroit en 1728 et 1732 respectivement.
La basilique fut construite en 1633 par Samuel de CHAMPLAIN en partie sur le site actuel de la basilique. On la remplaça en 1647. La première messe fut célébrée le 24 décembre 1650. En 1744, étant en ruines, on la rebâtit mais peu de temps après, lors du siège de Québec, elle fut incendiée. On la reconstruisit 10 ans plus tard soit en 1768-69. C'est l'église que nous connaissons aujourd'hui.
Claude AUBER prononçait son nom AUBERT, ce qui porta a confusion car dans plusieurs répertoires et références son nom est épelé parfois AUBER et parfois AUBERT. L'épellation AUBER disparut dès la troisième génération. Les membres de la familles qui s'installèrent à l'Ile d'Orléans, Rivière Ouelle, Cap-St-Ignace, La Pocatière et Québec adoptèrent l'épellation AUBERT et les autres membres de la famille qui habitèrent St-François de Sales, Ste-Thérèse, St-Eustache et la province de l'Ontario adoptèrent l'épellation AUBE.
De son mariage avec Jacqueline, notre ancêtre eut un fils et quatre filles. A l'époque, c'était une petite famille. La descendance des filles est beaucoup plus considérable que celle de son fils unique. Par ses alliances, la famille AUBER s'apparente aux THIBAULT, PREMONT, ROBERGE, CHESNAY, CHENIER, BEAUDOIN, LEVESQUE, GARIEPY et autres. Fait assez curieux, Félix était illettré tandis que les filles firent leurs études chez les Ursulines. Dans l'ordre, il y eut: Félix, Marie, Geneviève, Elisabeth et Anne.